УКРАИНА - L'UKRAINE, POURQUOI CES VAGUES ? NE SOYEZ PAS CANDIDES!

« Maroussia », un chant populaire Ukrainien est tout indiqué pour vous mettre dans l'ambiance...

(Vous pouvez en visionner deux vidéos sur YouTube en fin d'article dont une en traduction française)

Et vous pouvez l'arrêter en cliquant ci-dessus sur le symbole :

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Préambule : Je me permets de rappeler que j'ai rédigé l'article que vous pouvez lire ci-dessous en décembre 2013 à la suite des manifestations « Euromaïdan »... Depuis beaucoup d'eau est passée sous les ponts !

 

En octobre 2006, déjà, j'avais fait paraître sur ce même site un article sur le meurtre d'Anna POLITKOVSKAYA, mais mes amis russes dont ma responsable logistique elle-même Ukrainienne, m'ont conseillé de ne pas le laisser en lecture directe de peur de représailles et je l'avais donc assorti d'un mot de passe. Il est vrai que dans ma propre équipe Européenne TACIS, j'avais vécu le meurtre d'un de nos experts français à coups de batte de baseball (cet assassinat s'est avéré mafieux et non politique par la suite, mais je ne pouvais pas m'en douter à l'époque).

 

En fin d'article vous pourrez trouver quelques mots sur Anna POLITKOVSKAYA, écrits par Raphaël GLUKSMANN, qui vous aidera à mieux comprendre ce qui vient de se passer en Ukraine ce 24 février 2022...  

 

Voici donc mon article publié en décembre 2013...

 

Aujourd’hui, ce que l’on croit être une petite république de l’ex-empire Soviétique n’a pas toujours été ce territoire humilié par la Russie ! Elle était « LA RUSSIE ».

 

Son territoire est un tout petit peu plus grand que celui de la France. L'Ukraine est, par sa taille, le deuxième pays d'Europe après la Russie. Sa superficie totale de 603 700 Km² est légèrement supérieure à celle de la France métropolitaine (551 500 Km²) mais par dessus tout, la moitié de son territoire est recouvert par le « Tchernoziom » qui en fait une des terres les plus fertiles du monde. 

 

Le « Tchernoziom » (en Russe : чернозём, contraction de чёрная земляtchernaïa zemlia, « terre noire ») est un type de sol très riche en humus (en Ukraine l'épaisseur du « Tchernoziom » va de 1 à 6m ! On rencontre également dans certains textes le terme « Tchernozem » car « Chernozem » est une transcription anglaise du mot russe, et les Chernozems sont un groupe de référence dans la Base de référence mondiale pour les ressources en sols.

 

L'histoire de l'Ukraine en effet, n’est pas ou est très mal connue. Son drapeau, qui allie le jaune des champs de blé sous le bleu Azur du ciel, est significatif de son origine et de sa vocation et réputation de « grenier de l'Europe » !

 

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Son nom « УКРАИНА » veut dire en Russe « confins ou frontières »… Située entre le massif des Carpates et les steppes de l’Asie centrale, à la limite du continent Européen, cette région peuplée d'un peu plus de 43 millions d’habitants fut l’une des terres les plus fertiles d’Europe car naturellement irriguée.

 

C’est dans le nord de l’UKRAINE que s’étaient installées les premières tribus Slaves dès le VIIème siècle. C'est qu'elle était située au carrefour de la Scandinavie, de l’Empire Byzantin, de l’Europe Centrale et de la mer Caspienne, fortement influencée par les Vikings qui furent à l’origine de la ville d’OLEH en 878, devenue KIEV plus tard.

 

Et sa situation au bord de la mer noire sur toute sa frontière sud l’a naturellement ouverte à la christianisation venue de Constantinople qui en fit, dès la fin du 1er millénaire, le berceau de la religion orthodoxe.

 

Cette Nation, à la culture brillante et florissante, a connu son apogée en Europe orientale avant de tomber dans la féodalité caractéristique du Moyen Age.

 

L’État de Kiev, ne pouvant plus assurer sa défense, fut pris par les Tatars en 1240 tandis que les régions de l’ouest, la Galicie et la Volhynie restèrent autonomes, permettant ainsi une continuité politique et culturelle de cet empire déchu.

 

Ensuite les Mongols envahirent tout le territoire et firent émigrer une grande partie des Slaves de la Russie de Kiev vers le nord. Mais, à peine un siècle plus tard, la Grande Principauté de Lituanie alliée au royaume de Pologne, alors en pleine expansion, conquit progressivement la presque totalité du territoire Ukrainien actuel en faisant reculer les Mongols.

 

Russes, Biélorusses et Ukrainiens partagent donc des origines communes.

 

Ainsi commence la dépendance de la nation ukrainienne aux grandes puissances qui l’entourent.

 

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Partant de là, son histoire sera déterminée par sa position géographique. Avec comme voisins les deux puissances Russes et Polonaises, le peuple Ukrainien n’aura aucun autre choix que celui de faire allégeance à l’un ou à l’autre pour préserver un embryon d’État qui deviendra le vassal puis un simple territoire russe au cours du XVIIe siècle.

 

Le soulèvement cosaque contre le royaume polonais amena à la création de l'hetmanat par Bogdan KHMELNITSKY en 1648, qui, pour résister à la pression polonaise et tatare, signa le traité de Pereyaslav avec la Russie en 1654. Ce traité qui prévoyait l'autonomie de l'entité ukrainienne devint rapidement obsolète sous Pierre le Grand puis Catherine II.

 

Au cours des siècles suivants, le peuple ukrainien ne fera que subir les luttes entre puissances se déroulant dans cette partie d’Europe. La paix d’Andrusovo de 1667 scella le premier partage du territoire ukrainien entre la Pologne et la Russie. Enfin, l’ouest de l’Ukraine passa sous le contrôle de l’empire Austro-hongrois à la suite des partages de la Pologne au cours du XVIIIème siècle (Les deuxième et troisième partages de la Pologne en 1772 puis 1795), tandis que l’est est resté sous domination russe !

 

Cette situation ne changea qu’au lendemain de la Première Guerre Mondiale avec l’effondrement de ces deux empires.

 

Une Ukraine indépendante revit le jour après des siècles de domination. Cependant, des cendres des empires naîtront deux différentes républiques: la République nationale d'Ukraine (Kiev) et la République nationale d'Ukraine occidentale regroupant les anciens territoires d'Autriche-Hongrie.

 

Ce n'est qu'en 1919 qu'une réunification fut planifiée, trop tardivement pour permettre le maintien d'une Ukraine indépendante.

 

L’histoire troublée du peuple Ukrainien et l'absence d'armée nationale rendit difficile l’émergence d’un État fort, capable de résister à cette époque d’instabilité sur le continent européen.

  

Cette courte indépendance prendra fin en mars 1921 par la signature du traité de Riga mettant fin à l’affrontement entre les forces russes et polonaises, et partageant l’Ukraine entre ces dernières, exception faite des provinces de l'ouest, la Bukovine qui est rattachée à la Roumanie et la Ruthénie qui est concédée à la Tchécoslovaquie.

 

La majeure partie de l’Ukraine passa alors sous contrôle bolchevique et devint une République Socialiste de l’Union Soviétique, bénéficiant officiellement d’une autonomie relative, même si la Russie fut la seule représentée en 1922 à la Conférence de Gênes sur la reconstruction de l’Europe.

 

Mais cette toute relative tolérance de Moscou envers la culture Ukrainienne, tolérance visant à « convaincre » une population majoritairement paysanne du bien-fondé de la révolution prolétarienne, survint la terrible répression stalinienne avec la « famine artificielle » de 1933 et son lot de purges qui a constitué un véritable génocide avec environ 6 millions de paysans morts de faim et un million de déportés pendant que l’URSS exportait le blé ukrainien ; le caractère artificiel, élément fondamental de la définition du génocide est cependant à nuancer. Ce dernier fait encore l’objet de débat, notamment sur les causes réelles de cette catastrophe humanitaire.

 

Dans sa lutte contre la bourgeoisie et la paysannerie qui était majoritaire en Ukraine, elle s'efforça de réprimer toute affirmation identitaire ou religieuse - déportant ou exécutant la quasi totalité de l'élite Ukrainienne. Pour mater la paysannerie résistante à la collectivisation, des quotas exorbitants de production furent institués sur les récoltes.

 

Cette politique s'avéra dramatique et entraîna le plus grand drame ukrainien : « l'Holodomor ». Cette famine qui s'abattit sur l'Ukraine de 1932 à 1933 et qui fit plus de 7 millions de morts, toujours pas reconnue par la Russie !

  

Depuis, l’Est de l'Ukraine est toujours resté sous domination russe et les Russes sont venus « coloniser » la région.  

 

J'ai constaté ces mêmes phénomènes au Kazakhstan et au Kirghizstan lors de la formation de la CEI. Mais là, les citoyens Russes restés sur les territoires devenus indépendants n'ont pas fait l'objet de cette « récupération » du pouvoir central de Moscou parce qu'il n'y avait aucun intérêt stratégique ni économique...  

 

Alors que la Crimée, c'est non seulement une avancée dans la mer noire qu'apprécient beaucoup les Russes (comme si l'on demandait aux Français d'abandonner le département des Alpes Maritimes à l'Italie...) et la Russie aurait dû reconstruire un port conséquent comme l'est Sébastopol sur la côte entre le détroit de Kerch (qui sépare, à l'est, la presqu'île de la Crimée du continent) et la côte de la Georgie à peine 200 Km plus au sud, pour abriter sa flotte.

 

Là, hormis le port de Novorossiysk bien trop exigu, il n'y avait pas de site naturel capable d'abriter la flotte en eaux libres et de façon sécuritaire. 

 

C'est qu'en effet, pendant plus de 6 mois, en hiver, les glaces bloquent tous les ports russes situés sur l’océan arctique. Le gouvernement russe ne dispose alors pour ses bateaux que des ports situés sur la mer Noire. Or, avec la mondialisation de l’économie, de plus en plus de marchandises transitent par les ports russes situés en Crimée.

 

Poutine ne peut donc pas laisser un mouvement indépendantiste ukrainien prendre le pouvoir, et ainsi priver de ports la Russie 6 mois par an.

 

Un mouvement politique avait bien pris le pouvoir en Ukraine, mouvement indépendantiste qui cherchait à libérer l’Ukraine  du pouvoir russe, ce qui priverait la « Grande Russie », de disposer d’un port en eaux libres. Situation économiquement catastrophique pour la Russie, et insupportable pour son dirigeant. 

 

Poutine a donc donné à ses troupes l’ordre de pénétrer en Ukraine, de l’occuper militairement en évitant autant que possible les affrontements militaires et pire, en dissimulant ses troupes sous les apparences de milices nationalistes indépendantes composées de pro-Russes qui tiennent à demeurer Russes.

 

Les Ukrainiens n’ont pas résisté et ils ont laissé les troupes russes occuper leurs bâtiments officiels.

 

Les pays occidentaux sont favorables au mouvement indépendantiste ukrainien, donc opposés à l’occupation militaire de l’Ukraine.

 

Mais ils n’envisagent pas une action militaire. Par contre, ils mettent en place des sanctions économiques et politiques qu'ils seront bien en peine d'appliquer car l'appareil Européen est beaucoup trop lourd des différences d'intérêts de ses membres, et ça, Poutine le sait bien, et joue avec le feu en brandissant sa force militaire alliée à l’appui qu'il vient de recevoir de la Chine qui pense aussi que sans le port de Sébastopol, la Russie est économiquement ingérable.

 

Quant à la Chine... Elle a tout intérêt à soutenir Poutine dans ses tentatives d'annexions... C'est que s'il réussissait, ce serait un gage pour les Chinois du bien fondé de leur projet de récupération de Taïwan !

 

Si les occidentaux ne réagissent pas à l'agression de Poutine, il auront du mal à réagir à l'agression dont rêve la Chine sur Taïwan !

 

Poutine et les responsables du mouvement indépendantiste ukrainien ont donc du négocier une solution en demi-teinte.

 

Les responsables politiques Français, Allemands, Anglais ou Américains essaient maintenant de trouver avec Poutine la solution qui donnera au peuple Ukrainien une relative indépendance tout en laissant la Crimée et le port de Sébastopol à la disposition du gouvernement Russe. Mais il m'étonnerait qu'il ne s'en tienne qu'à la Crimée et le Donbas sans essayer de s'approprier les terres qui séparent la Crimée du territoire Russe ! 

 

Les réunions ont succédé aux réunions, les coups de téléphone aux coups de téléphone, d'autant plus que les européens ont hélas besoin du gaz provenant de Russie, tandis que leurs usines y ont de plus en plus de clients.

 

L’intervention des tanks de Poutine a déclenché une négociation économique de taille mondiale opposant d’un côté les pays occidentaux favorables à une indépendance de l’Ukraine et le bloc Russie/Chine, encore versé du côté du communisme bien que la situation soit ingérable à terme.

 

De la part de Poutine et de son gouvernement, ça a donc été bien plus simple de titiller les Ukrainiens Russes de Crimée pour conserver la main sur la presqu'île et faire adopter par référendum le rattachement ! C'est ce qui s'est passé au grand dam du gouvernement Ukrainien momentanément fragilisé par les dernières tergiversations et troubles de Kiev.

 

J'avais écrit ce qui précède dès l'information des troubles engendrés par les manifestations « Euromaïdan » qui ont été confirmés par l'envahissement sournois de la Crimée et d'une partie du Donbas, qui s'est terminé par une annexion pure et simple de ces deux régions par la Russie bien qu'elle les ait déclaré autonomes pour la forme...

 

Ce qui s'est passé en Tchétchénie puis en Géorgie pouvait laisser augurer que Poutine ne s'en tiendrait pas là, puisque les protestations du monde occidental d'alors n'ont pas été contraignantes... pour lui qui tenait absolument à récupérer un accès à la mer noire pour sa flotte.

 

Il l'a fait depuis, et en envahissant 20% du territoire Ukrainien, il va être difficile de le lui faire restituer.  

 

Dans le classification des différentes sortes de gouvernement, Aristote définissait au IVème siècle de notre ère, l'oligarchie comme le pouvoir d'un petit nombre d'hommes veillant à leurs seuls intérêts. Il n'avait pas prévu le système de pouvoir dans lequel un seul homme, Poutine en l'occurrence, dompterait l'oligarchie au service d'un seul, lui !

 


 

À propos d’Anna POLITKOVSKAYA, Raphaël GLUCKSMANN a écrit le 7 octobre 2022

 

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 Anna POLITKOVSKAYA

 

Il y a 16 ans, jour pour jour, les sbires de Poutine ont tué Anna POLITKOVSKAYA, la personne la plus courageuse que j’ai croisée dans ma vie.

 

Une immense journaliste et une amie très chère. Si nos dirigeants l’avaient écouté, nous n’en serions pas là aujourd’hui.

 

Anna avait vu dans la guerre de Tchétchénie le laboratoire du « Poutinisme », les prémices du fascisme en Russie et d’une grande guerre qui déstabiliserait l’Europe.

 

Elle avait vu, dit, écrit. En vain. Qui l’écoutait alors à Paris, Bruxelles, Berlin ou Washington ?

 

Lisez aujourd’hui ces livres - notamment « Tchétchénie, le déshonneur russe » - et vous comprendrez d’où viennent les fosses communes de Boutcha ou les massacres de Marioupol. Vous assisterez à la gestation du monstre que nos élites ont laissé croître et même nourri.

 

Je me souviens comme si c’était hier d’un dîner. Je revenais de deux mois à Kiev, au cœur de la Révolution orange, pour réaliser un documentaire sur les soulèvements démocratiques à l’Est. J’avais vécu au milieu des jeunes révolutionnaires et j’étais enthousiaste.

 

Je lui ai raconté la ville sens dessus dessous, la joie, l’anti-Poutinisme de générations aspirant à vivre libres. Elle souriait. Et puis elle m’a dit : « c’est magnifique, mais Poutine ne laissera pas faire. Il finira par envahir l’Ukraine pour les ramener à la servitude ».

 

Je me suis dit qu’elle était pessimiste, j’ai essayé de la contredire. Alors elle m’a repris : « Raphaël, Poutine fera la guerre. Je ne sais pas quand, mais il la fera. Les Européens seront alors surpris de découvrir que cette guerre les visera. C’est le sens de son régime. »

 

Pourquoi les élites européennes n’écoutent-elles jamais les premiers concernés ? Pourquoi nos diplomates et nos commentateurs n’ont-ils pas écouté les Tchétchènes, les Georgiens, les Ukrainiens ou les Estoniens ? Pourquoi n’ont-ils pas écouté Anna ?

 

Non seulement l’UE et l’OTAN n’ont pas voulu la grande confrontation actuelle avec la Russie, mais elles ont tout fait pour ne pas la voir venir. Prisonniers de leurs illusions et de leurs certitudes, nos dirigeants ont refusé d’écouter Anna et les autres lanceurs d’alerte.

 

S’ils avaient juste pris en compte un dixième de ce qu’elle disait ou ouvert l’un de ses livres, Poutine n’aurait pas la légion d’honneur, Chirac, Sarkozy, Macron ne l’auraient pas courtisé, Schröder et Merkel n’auraient pas confié les clés de l’énergie européenne à Gazprom.

 

Anna troublait la fête. Elle est morte sans avoir été entendue. Et les 7 octobre sont si tristes depuis... Le jour de l’anniversaire de Poutine, ses sbires ont tué mon héroïne.  

 

Et les dirigeants occidentaux ont continué à embrasser l’assassin, jusqu’au 24 février 2022...

 

 


 

Visionnez une vidéo de Maroussia un chant populaire Ukrainien...

 

 

Et la même chanson avec traduction des paroles en français pour ceux qui me l'ont demandé !

 

 

 


 



23/04/2014
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