05/2025 - AFGHANES : L’EFFROI, L’IMPUISSANCE ET L’ACTION

 

LES FEMMES AFGHANES : EFFROI, IMPUISSANCE ET ACTION
Par  Valentine HONORÉ *

 

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Valentine HONORÉ *


Je souhaite relayer l’action de la truculente et passionnée Valentine HONORÉ, en lui offrant la vitrine de ce modeste site qui accueille tout de même plus de 15000 lecteurs chaque mois... Voici un de ses derniers articles, je cite : 

  
« Lors d’une soirée pluvieuse, installée paisiblement dans le salon de mon appartement de GENÈVE, poussée par la nostalgie de mon 38ème printemps déjà passé, je feuillette les albums photos de ma vie d’avant, de ma vie d’exploratrice.

 

C’est un mot que j’aime bien, exploratrice, quel mot plein de promesses ! Bien qu’en me l’attribuant, cela donne l’impression de ne plus passer les portes.

 

D’autres diraient aventurière, quand d’autres encore, plus justes, diraient simplement, expatriée. Je parcours celui d’Afghanistan, qui contient de beaux tirages en noir et blanc, de cette époque glorieuse ou je faisais encore de l’argentique.


Je revois les visages de femmes afghanes, photographiées lors des week-ends aux alentours de KABOUL, à ISTALIF, PAGHMAN, ou lors de visites de projets d’aide humanitaire dans le WARDAK, la vallée du PANJSHIR.

 

Je revois leurs regards qui dégageaient souvent tant de dignité.


Pendant ces quatre années en Afghanistan, combien de femmes afghanes ai-je eu la chance de rencontrer ?

 

Combien de femmes infirmières, anesthésistes m’ont inspirée à l’Institut médical français pour l’enfant où je travaillais ? Combien de filles en uniformes, le regard fier de celles qui apprennent, ai-je croisé dans les visites d’écoles ?


Soudainement, surgit une grande tristesse, un abîme sans fond. Depuis le retour des talibans au pouvoir en Afghanistan il y a deux ans, les femmes afghanes sont plongées dans une longue nuit. Dans ce 21ème siècle de fracas, elles vivent une vie en cage dans des maisons devenues leurs prisons.

 

Les talibans leur ont déclaré la guerre, elle est totale, le sexe féminin doit être éradiqué de la vie publique. C’est un nouveau fascisme, mais le reste du monde regarde déjà ailleurs. Elles sont bannies des bains publics (souvent seul accès à l’hygiène), des salons de beauté, des écoles pour les filles de plus de douze ans (2.5 millions de filles sont déscolarisées), de nombreuses professions.

 

L’institut de recherche Samuel Hall projette que l’effet cumulatif de la génération perdue de femmes afghanes exclues des collèges et lycées, se traduira par une perte de 10 milliards de dollars, soit 2/3 du PIB actuel du pays.


Devant l’ineffable souffrance de ces femmes, nous ressentons tous l’effroi et l’impuissance. Sur le mal, le philosophe JANKÉLÉVITCH a « conscience de l’infini du mal » et il en appelle donc à la nécessité de l’infini de l’amour, non que celui-ci soit certain de l’emporter, nullement, mais lui seul est à la hauteur de la puissance du mal, lui seul peut faire face et permettre à l’Histoire d’espérer se déployer autrement » (Cynthia FLEURY, « Un été avec JANKÉLÉVITCH »).


Depuis mon retour du terrain, le «  Curiosity Club » m’a invitée à prendre la parole pour raconter mon engagement humanitaire. J’aime transmettre dans mes « Curiosity Talk » la nécessité de se souvenir des femmes qui dans de trop nombreux pays ne sont pas libres et d’agir pour elles.

 

Je cite souvent la grande juge de la Cour suprême des Etats-Unis, Ruth Bader Ginsburg, qui demande de « toujours tenter de faire quelque chose en dehors de vous-même, battez-vous pour une amélioration même modeste pour les autres, pour ceux qui ne sont pas chanceux comme vous l’êtes ».


Seule l’action peut tenter de faire sens de l’immense catastrophe dont sont victimes les Afghanes. Voici des exemples concrets de l’aide que vous pouvez leur apporter :


- Faire un don aux associations FEMAID et NAYESTANE, et au projet « Laissez-nous apprendre » qui soutient la création d’espaces temporaires d’apprentissage.

- Faire un don à Radio Begum, qui a pour mission de donner une voix aux femmes afghanes, et éduquer les filles.

- S’informer, en lisant le livre de la grand reporter Solène CHALVON-FIORITI, La femme qui s’est éveillée : « une histoire afghane » (Éditions Flammarion) et regarder son documentaire bouleversant « Afghanes ».

- Faire pression sur vos élus locaux pour autoriser le droit d’asile et des visas humanitaires pour les femmes afghanes ; et vos universités pour accueillir de jeunes étudiantes d’Afghanistan.

Hier soir, la Présidente de l’association FEMAID m’a envoyé un message d’une des institutrices : « Actuellement, les écoles clandestines sont comme des tranchées entourées par l’ennemi de toute part. Mais vous pouvez être certaine que même s’il ne reste qu’un centimètre d’espace à creuser, nous le creuserons et créerons un chemin pour continuer l’éducation de nos filles. On fait de notre mieux pour rester debout et Insh allah, continuer d’avancer, jusqu’à ce que le dernier chemin nous soit clos ». Leur courage nous oblige. Notre action et notre amour peuvent aider l’Histoire pour espérer qu’elle se déploie autrement.

Je m’appelle Valentine HONORÉ et vous remercie de m’avoir lue.

 

J’aimerais vous écrire encore, car des choses à dire, j’en ai beaucoup. Sur ma mission en Ukraine, l’engagement écologique et de la vie qui vaut la peine d’être vécue, encore plus quand nous agissons pour les autres ! » 

 

 


 

 

BIBLIOGRAPHIE

 

* Valentine HONORÉ est déléguée de protection de la Croix Rouge Internationale à Genève.      

 

Afghanistan, Iran, Kenya, Somalie, République démocratique du Congo... Valentine HONORÉ parcourt les zones de conflit armés avec le dialogue comme seule arme de paix.

 

Après des études à Sciences Po et un Master en « War Studies » au King’s College de Londres, elle avait décroché un volontariat international à l’Ambassade de France en Afghanistan au sein des affaires humanitaires.

 

 


 



11/06/2025
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