LE CARRE MAGIQUE d'ALBRECHT DÜRER
Nous verrons dans un article spécialement consacré au Feng-Shui les implications des carrés magiques.
Mais je ne peux m'empêcher de vous transmettre immédiatement cette exception découverte par Albrecht DÜRER en 1514 !
LE GENIAL ALBRECHT DÜRER (1471 - 1528) ET SON CARRE MAGIQUE !
Autoportrait qu'il fit à l'âge de 28 ans
Petit fils d’un orfèvre Hongrois immigré à Nuremberg, le père d’Albrecht devient orfèvre à son tour et part pour faire son apprentissage ; il découvre Vitruve et inclut le canon de la Divine Proportion dans ses œuvres gravés (cf. l'article spécialement consacré à la Divine Proportion sous le titre "NOMBRE D'OR & HARMONIE"...)
Selon la tradition familiale, son jeune fils Albrecht est lui aussi destiné au métier d'orfèvre.
À 13 ans, il devient donc apprenti chez son père pendant trois ans et apprend à se servir du burin et de la pointe. Voyant les dons de son fils pour le dessin, son père lui donne la permission d'entrer dans l'atelier d'un peintre.
C'est ainsi qu'en 1486, il devient l'apprenti de Michael Wolgemut, avec qui il apprend à manier la plume et le pinceau, à copier et dessiner d'après nature, à réaliser des paysages à la gouache et à l'aquarelle et également à peindre à l'huile. Il se familiarise également avec la technique de gravure sur bois. Il y reste trois ans et se familiarise avec l’ésotérisme.
Il s’intéresse ainsi aux carrés magiques qui sont, dans les ésotérismes juif et islamique, associés à des connaissances secrètes qui furent transmises, pendant et avant l'époque de Dürer par des confréries d'ésotérisme chrétien qui maintenaient des relations suivies avec les initiés à l'ésotérisme islamique.
En ordonnant les nombres de 1 à 2, 3, 4, 9, 25, etc... (ou tout autre nombre carré supérieur à 4), une grille carrée peut être remplie de façon telle que la somme sur chaque ligne horizontale, verticale ou diagonale ait la même valeur.
Les carrés magiques utilisés dans l'hermétisme sont d'ordre "n", c'est-à-dire qu'ils ont "n" lignes et "n" colonnes, correspondant aux entiers allant de 1 à n2. La somme de tous les nombres d'un tel carré magique de taille "n" a pour valeur :
1 + 2 + ... + n² = n² (n² + 1)
2
tandis que la valeur de ce carré, c'est-à-dire le même nombre que l'on retrouve en sommant les lignes, les colonnes, ou les deux diagonales vaut, puisqu'il y a "n" lignes et "n" colonnes, la quantité précédente divisée par "n", c'est-à-dire :
1 + 2 + ... + n² = n (n² + 1)
n 2
Les différentes tailles "n" sont mises en correspondance avec les « cieux » dans les représentations traditionnelles, ainsi :
Le carré d'ordre 3 correspond au ciel de Saturne. Je me permets de m'y attarder quelques minutes pour donner le ton... il est encore appelé le carré magique "Lo Shu"
Une très ancienne légende rapporte qu’à l’origine il a été découvert en Chine, sur les bords du "fleuve Lo" (le "fleuve Jaune") par l’empereur Fu-Xi (ou Fo-Hi) lui-même, vers 2400 avant J.C., qui, en observant une tortue d'eau qui marchait sur la berge du fleuve, fut frappé par le motif des écailles de sa carapace… dans lequel il distinguait un damier de neuf cases. Celle du centre contenait 5 taches, et les autres 1, 2, 3, 4, 6, 7, 8 et 9 taches.
En vérité, comme on a pu le découvrir au siècle dernier, les chiffres dit arabes (parce que ce sont les arabes qui les ont véhiculé, et tout particulièrement le zéro) ainsi que le carré magique (appelé encore carré de Saturne) ne sont pas d’origine chinoise mais proviennent des Indes.
Ce même carré à 9 cases, ornait la chevalière du roi Salomon… Et on le retrouve en Occident dans de nombreux édifices (il apparaît, par exemple, sur la façade de la cathédrale de la Sagrada Familia de Gaudi à Barcelone)…
Nota bene : Comme nous l'avons vu plus haut, les chiffres de 1 à 9 sont disposés de telle manière qu'en les additionnant verticalement, horizontalement ou en diagonale. Le nombre "15" s'impose toujours. La somme de tous ses nombres vaut 1 + 2 + 3 + 4 + 5 +6 + 7 + 8 + 9 = 45, et sa valeur est 15.
Il y a d'autres carrés magiques dont les sommes demeurent constantes, mais celui là est exceptionnel parce qu'il n’utilise que les seuls chiffres de 1 à 9.
Le Carré magique a inspiré par la suite ce même empereur chinois Fu-Xi et ses successeurs, la création de "trigrammes" symbolisant l'évolution constante des choses et la célèbre théorie du Yin ch'i et du Yang ch'i combinant ainsi deux éléments binaires des trigrammes, le Yin et le Yang.
Le carré d'ordre 4, attribué à Albrecht DÜRER, tel celui que l'on trouve dans la Melencolia (une gravure de DÜRER qu’il a faite en 1514 – cf. plus loin), est associé au ciel de Jupiter. La somme de tous ses nombres vaut donc 136, et sa valeur est 34.
Le carré d'ordre 6 est traditionnellement associé au ciel du Soleil. La somme de tous ses nombres vaut donc 1 + 2 + ... + 36 = 666, et sa valeur est 111.
Ainsi, on retrouve le fait que 666 est avant tout considéré, notamment par la Kabbale, comme un nombre « solaire », et c'est uniquement l'un de ses aspects, négatif (666 : le fameux Nombre du Diable!), qui doit être considéré comme « maléfique », et non le nombre en lui-même, qui garde avant tout cet aspect solaire.
Mais revenons au carré d'ordre 4 qui figure dans la gravure « Melencolia » d'Albrescht DÜRER. C'est un type bien particulier de carré magique: la somme dans l'un de ses quatre quadrants, ainsi que la somme des nombres du carré du milieu, valent également 34, la valeur du carré. C'est un carré magique "Gnomon".
Vers la fin du XVe siècle Luca Pacioli a été le premier à publier des exemples de carrés magiques mais il est possible que DÜRER ait eu connaissance du manuscrit De Philosophia Occulta que Cornelius Agrippa avait déjà rédigé vers 1510.
L'arrangement particulier qu'il a choisi, comporte, au milieu de la dernière ligne, les nombres 15 et 14 qui correspondent à la date de confection de la gravure, 1514. De plus, étant lié avec Jupiter, par son caractère « jovial » ce carré devrait être une influence bénéfique contre la mélancolie. Les propriétés numérologiques de cet élément de la gravure peuvent donner l'occasion à de nombreuses interprétations.
Ici, ce sont les nombres 3 et 4 qui sont significatifs : ils apparaissent de façon symétrique dans la Tétraktys pythagoricienne: 1 + 2 + 3 + 4 = 10 = 3 + 4 + 3. Ce carré magique est relié à une certaine interprétation cyclique du dénaire (i.e. qui contient le nombre 10 en base 10). Dans le cas de la gravure, il est lié à une interprétation de nature apocalyptique.
Dans ce carré magique, si on se réfère aux carrés intérieurs, en parcourant le sens des aiguilles d'une montre, on trouve la suite consécutive des nombres 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, avec un dédoublement pour la valeur 17.
En haut à droite de la gravure “Melencolia“, sur la stèle, juste en dessous de la cloche, se trouve ce carré magique créé par Dürer. Il apparait grossi sur la photo que j'ai extrait ci-dessous à gauche pour le faire apparaître encore plus clairement, j'en ai fait une épure plus claire à droite :
Et qu’est-ce qui est magique ? C’est le nombre 34 qui est la somme de différents champs du carré, je m’explique :
la somme de chaque rangée est égale à 34 !... La somme de chaque colonne est égale à 34!... Mais la somme des 4 coins, à savoir 4 + 16 + 13 + 1, est encore égale à 34 !
Déplacez les champs dans le sens des aiguilles d'une montre (dextrogyre) et la somme 3 + 8 + 14 + 9 = 34 ! Et déplacez les champs encore une fois et la somme 5 + 2 + 12 + 15 est toujours = 34!
La somme des champs au milieu 10 + 11 + 6 + 7 = 34 !
Tout comme sur les cotés 5 + 9 + 8 + 12 = 34 !
Tout comme en haut et en bas où 3 + 2 + 15 + 14 = 34 !
C’est toujours vrai pour les diagonales... 4 + 6 + 11 + 13 = 34 et 16 + 10 + 7 + 1 = 34 !
Et ainsi de suite, en tournant dextrogyre... 5 + 3 + 12 + 14 = 34 !
Mais encore 2 + 8 + 15 + 9 = 34 !
Bref, Dürer a créé ce carré en 1514. Et pur hasard cette fois, le C de "Carré" est la 3eme lettre de l‘alphabet et le D de "Dürer" est la 4eme! Donc 4 + 15 + 14 + 1 = 34 ! CQFD...
Albrecht DÜRER était tres fier d‘avoir créé ce carré... et il y a avait de quoi l'être!