INDOCHINE & DIÊN BIÊN PHU, POUR RAFRAICHIR NOS MÉMOIRES

 

Pour illustrer cet article, sans hésitation, bien qu’il chante une chanson de Joséphine BAKER

C’est Maurice CHEVALIER qui le fera le mieux car il y a ajouté sa petite touche personnelle,

N'y entendez aucun jugement de valeur qu'un air que les moins de 20 ans ne peuvent connaître!

Pour la mettre en route, cliquer sur la flèche et pour l’arrêter sur un des symboles suivants :

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Grâce à Napoléon III, le second Empire a donné à la France un formidable élan économique malgré sa fin tragique consécutive à l’humiliation de la guerre franco-prussienne dont le gouvernement français avec le maréchal Mac MAHON à la tête d'une armée de 120000 hommes avait lancé l'offensive.

 

La défaite de Sedan qui a marqué la fin lamentable du conflit en septembre 1870, fit perdre à la France l’Alsace et la Lorraine, et son empereur, Napoléon lll, qui fut fait prisonnier par les Allemands.

 

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L'empereur Napoléon III

 

Cette petite vidéo de 4 minutes vous remémorera le déroulement de ce triste épisode…

 

 

Mais la France ne s’est pas laissé abattre !

 

Après la capitulation, les dommages de guerre de 5 milliards de francs-or qui lui furent imposés ont été honorés en moins de deux ans par les français sur leurs bas de laine, dans un extraordinaire élan patriotique. 

   

Dès l’avènement de la 3ème République qui a succédé à l’Empire, et après le dramatique intermède de « la Commune de Paris », le gouvernement français a manifesté sa volonté de reprendre en main son empire colonial et même de conquérir de nouveaux territoires à l'instar (et par esprit revanchard en concurrence avec) des Anglais…

  

Il faut avoir en mémoire que cet esprit de revanche de la France sur les Britanniques remonte très loin, au souvenir de la « Compagnie Française des Indes Orientales » créée par Colbert en 1754, qui lui avait permis d'établir aux Indes son premier empire colonial que le Traité de Paris de 1863 lui avait proprement démantelé presqu'aussitôt, propulsant ainsi la Grande-Bretagne au rang de première puissance mondiale.

  

La France a ainsi perdu le Canada et la Louisiane, au profit des Britanniques, ainsi que ses conquêtes aux Indes. Il ne lui restait plus que quelques îles sur les 5 continents, et en Asie les seuls cinq comptoirs Indiens de PONDICHÉRY, KARIKAL, YANAON, MAHÉ et CHANDERNAGOR, qu'elle conservera pourtant sous la forme d'établissements jusqu'en 1949.

 

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L'Inde Française de 1741 à 1754

 

Dans le Pacifique, à la recherche d’un territoire pour installer un bagne, elle fait main basse durablement sur la Nouvelle Calédonie en 1853 au nez et à la barbe des Britanniques.

 

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 La Nouvelle Calédonie...

 

Puis la France met un pied en Asie, en Cochinchine, à l’embouchure du fleuve Mékong, le sud du Vietnam actuel ; c’était en effet une région qui représentait un intérêt stratégique certain sur le plan économique pour freiner la boulimie britannique en Asie et une base pour progresser vers le nord, ce qui pouvait lui permettre d’ouvrir une porte sur la Chine.

 

C’est que la Chine n’était pas encore la grande puissance qu’elle est devenue et représentait un attrait économique certain pour la 3ème République en quête d’avenir.

 

Mais le gâteau alléchant appartenait aussi aux concurrents Allemands, forts de leur récente victoire, mais aussi Russes, Britanniques, Américains ou Japonais.

 

La France savait très bien qu’elle n’aurait aucune chance de pénétrer la Chine par la mer, car les Britanniques, la première puissance maritime de l’époque, avaient déjà verrouillé tous les ports importants à l’est, comme HONG-KONG ou CANTON, et à l’ouest à BANGKOK sur la côte du SIAM (transcription du nom donné au peuple Thaï par les Khmers ou Cambodgiens, qui est devenu la Thaïlande en 1939 ) et plus à l'ouest, les Indes.

 

Un hasard lui fit organiser une expédition punitive conjointement avec les Espagnols; en effet, depuis le XVIIème siècle, des missionnaires chrétiens européens avaient évangélisé la région qui comprenait depuis près de 300000 convertis. 

 

C'est à la suite du massacre de deux missionnaires qu'une expédition franco-espagnole fut organisée à partir des forces militaires qui stationnaient dans les parages après avoir combattu à deux reprises le trafic de l'opium de marchands chinois qui perturbait les échanges commerciaux.

 

Et les soldats Français ont débarqué en un premier temps en Cochinchine, dans le delta du Mékong et c'est donc avec l'appui des Espagnols que la France a déclenché sa conquête militaire de la Cochinchine, en s'attaquant à SAÏGON, et ensuite fait la conquête de l'Annam, avec la prise de moindre importance de TOURANE (actuelle Da NANG).

 

 

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Prise de SAÏGON puis Prise de TOURANE par les navires de la flotte franco-espagnole 

Coup d’envoi de la présence française permanente en Asie du Sud-Est. 

 

Et la France a imposé un appareil colonial à cette partie de l’Asie du Sud-Est à marche forcée pendant plus d’un demi-siècle pour trouver des débouchés à son expansion coloniale, plus au nord et à l'ouest, vers le Tonkin et le Cambodge qui a débouché sur la formation de « l’Union Indochinoise » qui comprenait le Cambodge et le Viêtnam (réunion à l’époque du Tonkin, de l’Annam et de la Cochinchine). 

 

La seule alternative pour les Français de mettre les pieds en Chine était alors d'emprunter la petite porte terrestre qui se trouvait au nord de « l’Union Indochinoise » où elle avait mis le pieds, et... elle l’a fait ! 

 

Après la mise en place d’une administration coloniale qui couvrit toute la région, elle profita de la faiblesse de la Chine pour pénétrer la Province chinoise du YUNNAN et y trouver des sources d'approvisionnement.

 

… Ce siècle d’occupation se termina hélas par la guerre d’Indochine que la France fût obligée de mener de 1945 à 1954 parce qu’elle n’avait pas eu l’intelligence de se retirer à temps pour mettre en place une zone d’influence en laissant les peuples se déterminer eux-mêmes ce que les Britanniques avaient bien compris en créant leur Commonwealth.

 

J’ai la chance d’avoir rencontré dans les années 1980, NGOC NGUYEN CHAU, un historien autochtone, devenu un ami, qui a vécu la guerre d’indépendance à travers plusieurs membres de sa famille, et a vécu lui-même la guerre idéologique, quand, après des études en France, il est retourné au Vietnam pour travailler jusqu’à la chute de SAÏGON devenue HO CHI MINH VILLE en 1975.

 

Tout ce qui suit est un extrait résumé par lui-même de l’un des livres d’histoire qu’il a écrit pour transmettre aux nouvelles générations la connaissance de ce qui s’est passé en vérité dans cette région.

 

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Tout d’abord voici ce qu’a été « l’Union Indochinoise » :

 

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Pour avoir une idée exacte de ce que représentait l’Union Indochinoise ! 

 

1. LA CRÉATION DE « L’UNION INDOCHINOISE » (1887)

 

Trois pays étaient donc tombés entre les mains de la France au fur et à mesure de son avancée dans la conquête de leurs territoires dès 1858 - avec l’attaque de SAÏGON en Cochinchine puis de TOURANE en Annam (ville devenue Da NANG).

 

La création de « l’Union Indochinoise » par les décrets des 17 et 20 octobre 1887 réunissait alors le Viêtnam – divisé en trois « Kỳ » (régions ou pays, « Kỳ » voulant dire « drapeau »), dont la Cochinchine au sud, l'Annam au centre et le Tonkin au nord – et du Cambodge.

 

« L’Union Indochinoise » était administrée par un CGI, « Gouverneur Général d'Indochine ». La Cochinchine était une colonie dirigée par un « Gouverneur » alors que les trois autres parties étaient des protectorats gérés chacun par un « Résident Supérieur ».

 

Le protectorat Laotien n'a été instauré que plus tard en 1893, et la France n'a pas essayé de s'implanter plus au nord sur le territoire chinois du YUNNAN, pour éviter un conflit avec la Chine.

 

Elle s'est contentée de conclure des accords d'exploitation marchande en échange d'aménagements pour en retirer les fabuleuses ressources que pensaient y trouver une poignée d'aventuriers.

 

Toutefois l'opportunité s'est présentée de mettre un pied plus à l'Est du YUNNAN sur le « KOUANG TCHEOU WAN », un petit territoire maritime de 1300 Km² situé sur la côte chinoise (au nord de l’Île de HAI NAN), qui représentait un débouché maritime pour les marchands, que la France a loué à bail de 99 ans en 1898, à l’instar de HONG-KONG pour la Grande Bretagne ou e MACAU  pour le Portugal.

 

Le Laos et le « KOUANG TCHÉOU WAN » furent tous deux plus tard ajoutés à cette « Union Indochinoistit territoire français loué de « KOUANG TCHEOU WAN », est longtemps resté une partie périphérique insignifiante de l'Indochine française

 

Tout a changé après l’occupation du territoire par le Japon pendant la Seconde Guerre mondiale. À la fin de la guerre, la France a repris le contrôle du territoire aux forces du Kuomintang et s'est engagée à développer le territoire en tant que port militaire.

 

Le conflit en Indochine qui suit la fin de la guerre entraîne une importance croissante de « KOUANG TCHEOU WAN » pour les forces militaires françaises, malgré la perte du Laos et du Cambodge qui déclarent leur indépendance peu après.

 

Suite aux Accords de Genève de 1954, les Français évacuèrent le Vietnam et l'Indochine française prit fin - mais le Territoire de Kouang-Tchéou-Wan devint plus important que jamais.

 

 

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En tant que dernier territoire français en Asie du Sud-Est, le port a connu une période de développement intense tandis que la guerre civile chinoise ravivée a gonflé la population du territoire avec des migrants qui fuyaient le communisme.

 

Finalement, en 1954, le territoire fut rebaptisé « CANTONWAN », dans le cadre de la politique de francisation menée par le gouvernement métropolitain désireux d'éloigner sa population de la Chine Communiste.

 

Alors que la guerre froide s'apaisait et que la République Populaire de Chine se convertissait lentement à un modèle de libre marché, la France, la Grande-Bretagne et le Portugal ont entamé des négociations avec la République populaire de Chine concernant la restitution des territoires loués, à la condition de leur incorporation en tant que régions administratives spéciales dans le pays.

 

Un arrangement « un pays, deux systèmes ». Mais le territoire a finalement été réunifié avec la Chine en 1998 comme cela avait été prévu un siècle plus tôt, tout comme HONG-KONG pour la Grande-Bretagne et MACAU avec le Portugal !

 

A propos du territoire de « KOUANG TCHÉOU WAN » voici une intéressante vidéo qui rappelle l’histoire de cette « colonie fantôme » (pour votre information, prenez, après-coup, 30 minutes pour la visionner !)

 


 

Les Emblèmes patriotiques de l’Indochine…

 

Les drapeaux qui ont flotté en Indochine ont connu pas mal de changements au cours des différentes dynasties et populations qui s’y sont succédées du XVIIIème au XXème siècle.

 

Les emblèmes Indochinois se particularisent par l’utilisation des couleurs jaune et rouge, qui symbolisent respectivement la carnation naturelle de la population locale et le sang versé durant les guérillas, mais leur origine, tout comme ceux qui flottent dans les temples actuellement sont en réalité des emblèmes du cosmos, interprétant la philosophie cosmologique de la population.

 

Selon cette philosophie, l’univers est constitué de 5 éléments possédant chacun une couleur différente : le rouge représente le feu, le jaune représente la terre, le vert le bois, le blanc le métal et le bleu est associé à l’eau.

 

Entre 1770 et 1955, on recense 8 drapeaux différents, à savoir :




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Le drapeau de la dynastie Tây Sơn dans les années 1770 à 1802, avec un fond rouge, un grand disque jaune en son centre et une bordure en dent de scie de couleur jaune.

 

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Le drapeau du Royaume d’Annam lors de la dynastie Nguyễn entre 1863 et 1885, avec un fond jaune d’or, un grand disque rouge en son centre et une bordure bleu clair en dent de scie.

 

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Le drapeau du Vietnam du Centre entre les années 1885 et 1890, avec un fond orange et des caractères chinois en rouge signifiant Đại (Grand) Nam (Sud).

 

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Le drapeau de 1890 à 1920, avec un fond jaune qui représente le peuple vietnamien et trois bandes rouges horizontales au milieu, symbolisant l’union du Tonkin, de l’Annam et de la Cochinchine.

 

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Le drapeau de l’Indochine française, avec un fond jaune et le drapeau français en miniature sur son coin gauche supérieur.

 

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Le drapeau de la dynastie Nguyễn entre 1920 et 1945, avec un fond jaune et une large bande horizontale rouge en son milieu.

 

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Le drapeau de l’Empire du Vietnam, soutenu par les japonais, en 1945 avec un fond jaune et trois bandes rouges horizontales. La seconde bande présente une discontinuation en son centre pour se distinguer du drapeau Vietnam de 1890.

 

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Le drapeau de la République autonome de la Cochinchine de 1946 à 1948, avec un fond jaune et trois bandes horizontales de couleur bleue symbolisant les 3 grands fleuves du Sud du Vietnam : Đồng Nai, Tiền Giang et Hậu Giang.

 

 


Lors de la division du Vietnam entre 1955 et 1975, les deux régimes du Nord et du Sud ont adopté leurs propres drapeaux.

 

 

 

 

 

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Le drapeau choisi par la République du Viêt Nam (Sud-Vietnam) est celui utilisé par les anciennes dynasties qui ont gouverné le pays pendant des siècles, à savoir le drapeau Vietnam doté d’un fond jaune et de trois bandes rouges horizontales en son milieu.

 

 

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Le drapeau de la République Démocratique du Viêt Nam (Nord-Vietnam) présente un fond rouge et une étoile à cinq branches en son centre.

 

 

 

 

 

 

 

 

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Le drapeau du Gouvernement Révolutionnaire Provisoire (GRP) de la République du Sud Viêt Nam (1969-1976) qui était chargé d’administrer les territoires conquis au Sud-Vietnam par le FNL (Front National de Libération du Sud Viêt Nam, ou Việt Cộng), avec la moitié en haut rouge, la moitié en bas bleu et une étoile jaune au milieu.

 

NB : Adopté officiellement pour représenter le Vietnam du Sud « libéré » après le 30 avril 1975, il a été utilisé de mai 1975, lors de l’investiture à Saïgon du GRP, jusqu’à sa dissolution le 2 juillet 1976

 

 

 

Le drapeau du VIETNAM ACTUEL

 

Le drapeau du Vietnam actuel est celui adopté par la République Démocratique du Viêtnam du Nord.

 

Lors de la défaite de SAÏGON en 1975, l’utilisation officielle du drapeau jaune avec trois bandes rouges du régime du Sud cessa tout comme le pouvoir qui y était exercé.

 

 

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Cet emblème national, à la fois drapeau d’État, pavillon marchand, drapeau civil et pavillon de la République Socialiste du Viêtnam, possède une signification tout comme le sont la plupart des drapeaux des républiques socialistes :

  • Son fond rouge représente la révolte et le sang versé durant les luttes pour l’indépendance.
  • L’étoile jaune à 5 branches (ou pentagramme étoilé) symbolise l’unité des cinq intervenants dans l’établissement du socialisme, à savoir les paysans, les ouvriers, les soldats, les intellectuels et les jeunes. 

Et la France a organisé cette nouvelle colonie comme elle l’avait fait en Algérie puis dans tous les autres territoires de son empire colonial.

 

A Saïgon, Hanoï et les autres grandes viles Indochinoises, la France n’hésita pas à consacrer des capitaux fabuleux pour mettre en place toute l’infrastructure nécessaire pour s’y installer durablement et attirer les industriels français pour leur faire saisir les opportunités d’expansion, d’approvisionnement et de débouchés que cela pouvait représenter pour eux. Par Exemple, voici quelques vieilles cartes postales de Saïgon qui attestent des efforts consacrés :

 

 

8 - Cathédrale de Saïgon.jpg   10 - De belles avenues bordées de platanes.jpg
La Cathédrale et de belles avenues plantées de platanes comme en métropole !

 

11 - Les grnads magasin CHARNER.jpg   13 - La poste centrale et la Cathédrale.jpg

Les Grands magasins CHARNER où l'on pouvait trouver la dernière mode de Paris,

La cathédrale et la Poste Centrale.

 

Des milliards de francs ont été investis en Indochine, très souvent par des aventuriers qui, il faut le dire, n’ont pas reculé devant les difficultés, y compris celles de convaincre les autorités coloniales du bien-fondé de ces investissements.

 

 

Chemin de fer du YUNNAN 350 x 260.jpg   14 - Pont du chemin de fer parmi 3422 ouvrages d'art er 155 tunnels.jpg

Une locomotive des Chemins de fer d'Hanoï au YUNNAN en gare...

Parmi 155 tunnels et 3422 ouvrages d'art !

 

L’exemple de la construction du chemin de fer Tonkinois qui reliait HANOÏ au YUNNAN chinois sur plus de 900 Km vient confirmer cela (cliquer ici pour découvrir cette audacieuse, voire folle réalisation !)

 

Hélas, par arrogance et inconscience, le gouvernement français a fait la grave erreur de ne pas accorder aux autochtones les mêmes droits qu’aux Français de la métropole et il n’a pas senti tourner le vent et se remettre en question à temps en respectant la liberté des peuples à disposer d’eux-mêmes.

 

Cette aventure de « l’Union Indochinoise » aurait dû lui servir de leçon pour s’y prendre autrement, un peu plus tard, en Algérie. Nos dirigeants ont la mémoire courte ! 

 

La France s'était bien installée dans la région et de façon durable de 1887 à la veille de la seconde guerre mondiale... et n'a pas pris en compte les changements de mentalité au sein de la population autochtone ! 

 

Des investisseurs français en ont tout de même bien profité et même pendant que certains y ont fait fortune, d'autres y ont tout perdu...

 

 

2. DÈS 1941, LES JAPONAIS VONT S’IMPOSER EN INDOCHINE

 

 

La guerre avait en effet éclaté entre la Chine et le Japon le 7 Juillet 1937 suite à plusieurs incidents (1) et les Japonais après avoir envahi et annexé la Mandchourie dès 1931, sans réaction de la Chine, avaient, ô folie, poursuivi l'invasion en prenant PÉKIN, TIANJIN, SHANGHAI et NANKIN (à propos du conflit Japon/Chine et l'incident de MUKDEN qui l'a déclenché en 1931, voici un petit clin d'oeil à l'histoire du YMCA Pont d’Avignon au passage).

 

Après un message de pression des Japonais le 27 octobre 1938, le gouvernement colonial français arrêta l’utilisation de la voie de chemin de fer de HẢI PHONG au YUNNAN pour l’envoi d'armes et de munitions au Chinois TCHANG KAI CHEK.

 

À la réception d’un ultimatum le 19 juin 1940, tout transit de matériel vers la Chine cessa immédiatement et le gouvernement colonial accepta la présence d'une commission de contrôle japonaise aux frontières.

 

Le Gouverneur Général Georges CATROUX (1877-1969) avait répondu favorablement aux pressions japonaises sans en référer au préalable à la métropole et fut, pour cela, remplacé, par décret du 20 juin 1940, par l'amiral Jean DECOUX (1884-1963) commandant la marine en Extrême Orient.

 

Dans un télégramme à Paris le 26 juin 1940, il se justifia ainsi : « Quand on est battu, qu'on a peu d'avions et de défense antiaérienne, pas de sous-marins, on s'efforce de garder son bien sans avoir à se battre et on négocie. C'est ce que j'ai fait. Je suis à 4000 lieues de vous et vous ne pouvez rien pour moi... ! (2) ».

 

Pourtant par un traité signé le 30 août 1940 à TOKYO, le Japon reconnaissait la souveraineté de la France sur « l’Union Indochinoise » ainsi que les îles PARACELS et SPRATLEYS qui s'y rattachaient, tandis que la France reconnaissait le rôle majeur du Japon en extrême Orient et lui accordait l'autorisation d'utiliser des moyens militaires en Indochine.

 

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 Pour qui n’a jamais entendu parler des Iles Paracels et Spratleys 

Elles font toujours l’objet de revendications en 2023 !

 

Le traité militaire qui le complétait, signé le 22 septembre 1940 à HANỘI après un autre ultimatum des Japonais, précisa l'autorisation pour ceux-ci d'utiliser trois aéroports au Nord Viêtnam, d'y faire stationner 6000 hommes au nord du Fleuve Rouge, et de faire transiter un maximum de 25000 hommes.

 

La faiblesse de l'armée française, qui était aggravée par la désertion massive des troupes locales nouvellement recrutées et mal formées, avait poussé le général CATROUX à s’opposer à toute activité contre les Japonais.

 

Il avait tout fait pour l’éviter, allant jusqu'à solliciter l'aide des Britanniques et des Américains, mais en vain.

 

Dans la nuit du 7 décembre 1941, les Japonais contrôlèrent totalement HANỘI et prévinrent l'amiral DECOUX qu'ils avaient attaqué la base américaine de Pearl Harbour le jour même, et qu'un traité entre le Japon et la France sur l'Indochine était prêt à être signé.

  

Par cet accord, ratifié deux jours après, la France s'interdisait de faire obstacle aux opérations japonaises en Extrême-Orient et accordait au Japon le droit d'utiliser toutes les ressources en Indochine qui lui semblaient nécessaires.

   

À l'inverse, les troupes et les ressortissants français au nombre de 4000 n'étaient pas emprisonnés comme ce qui se passait avec les Anglais et les Hollandais en Malaisie et en Indonésie.

   

Les Japonais ont alors utilisé l'Indochine comme base d'opérations vers le sud-est asiatique (Malaisie, Indonésie, Philippines, etc.), à partir de 1942.

Par cet accord, ratifié deux jours après, la France s'interdisait de faire obstacle aux opérations japonaises en Extrême-Orient et accordait au Japon le droit d'utiliser toutes les ressources en Indochine qui lui semblaient nécessaires.

 

À l'inverse, les troupes et les ressortissants français au nombre de 4000 n'étaient pas emprisonnés comme ce qui se passait avec les Anglais et les Hollandais en Malaisie et en Indonésie.

 

De fait, dans les années 1930, le Japon, qui manque de ressources naturelles et avait été frappé par la Grande Dépression, avait accéléré sa politique expansionniste. 

   

A la suite d'un évènement banal déclenché à MUKDEN (en Mandchourie) le Japon envahit en 1931 la province chinoise de Mandchourie, puis le reste du pays en 1937. Trois ans plus tard, il avait signé un pacte tripartite avec l'Allemagne et l'Italie, et intégré l'alliance militaire connue sous le nom « d'Axe ».

   

Les Américains ont décidé alors de réagir et mettre en place un système de boycott sur un certain nombre de produits, notamment le pétrole.

    

Les Japonais ont alors utilisé l'Indochine comme base d'opérations vers le sud-est asiatique (Malaisie, Indonésie, Philippines, etc.), à partir de 1942.

    

Il y a alors une accélération des tensions et les deux parties sont en train de négocier tout en sachant que finalement les deux camps n'arriveront pas à trouver de solution.

   

Après l'attaque surprise de « Pearl Harbor » menée par les forces aéronavales japonaises le contre une base navale américaine située sur l’île d’Oahu, dans le territoire américain d’Hawaï (pertes américaines importantes de 2403 morts et 1178 blessés, deux cuirassés détruits ainsi que 188 avions) qui visait à détruire la flotte du Pacifique de l’US Navy, pour empêcher les États-Unis d'intervenir, ils sont poussés à entrer dans le conflit mondial.

   

En juillet 1944, le général de GAULLE nomma le général Eugène MORDANT (1885-1959) chef de la résistance à partir de KUNMING en Chine et de CALCUTTA aux Indes et ordonna de lui parachuter des matériels de transmission et des armes (3).

 


3. Le coup de force des Japonais (9 mars 1945)

 

L'Indochine était le seul endroit conquis par les Japonais où le pouvoir était laissé au colonisateur.

 

Au début de 1945, ils s’y replièrent suite à la défaite de la bataille des Philippines.

 

Dans le même temps, l'aviation américaine attaquait le port de SAÏGON et leur flotte en mer de Chine, coulant 28 navires et endommageant 13 autres. S'attendant à un imminent débarquement des Américains, ils décidèrent de prendre le pouvoir pour éviter d'être attaqués par-derrière : ils étaient au courant de l'existence du général MORDANT et de ses réseaux.

 

Sur le papier, au début de mars 1945, les forces japonaises étaient moins nombreuses que celles des Français : 55000 hommes contre 60000 (4), mais la proportion des combattants à la disposition du général TSUCHIHASHI était plus importante : 35000 contre 30000. En plus, ils étaient tous japonais alors que les soldats français étaient hétéroclites : Européens, Vietnamiens, Cambodgiens, Laotiens, et des minorités montagnardes mal encadrées.

 

Après avoir placé des forces à proximité des points importants dans toute l'Indochine, le 9 mars 1945, les Japonais prirent de court les Français en réalisant une opération préparée dans le plus grand secret appelée Meigo Sakusen (action de l'éclair de lune).

 

Ils attaquèrent en même temps partout les troupes françaises et celles de la garde indochinoise.

 

L'amiral DECOUX lui-même fut arrêté au soir du 9 mars 1945 au palais du gouvernement général où un rendez-vous avait été pris par l'ambassadeur YATSUMOTO pour « conclure un accord sur les livraisons de riz en 1945 » et pour discuter en privé « des dépenses

 

 

4. L’Indochine n’appartenait plus à la France (1945)

 

Le Japon choisit de rendre la liberté au Centre Viêtnam, au Cambodge et au Laos, et de mettre sous contrôle de l'armée les deux régions Sud et Nord Viêtnam où se trouvait le gros de ses forces de défense (7).

 

« Le Japon a été contraint de prendre les affaires en main en Indochine en raison des activités subversives de la résistance française. Celle-ci recevait des armes et avait l'intention de gêner les mouvements de notre armée », était le message de l'ambassadeur du Japon en Indochine à l'empereur BẢO ĐẠI.

 

Puis il précisa « Nous voulons redonner l'Asie aux Asiatiques. Je suis chargé de remettre à Votre Majesté l'indépendance du Vietnam ».

 

De fait, BẢO ĐẠI déclara l'indépendance du Viêtnam (8) le 11 mars 1945, près de six mois avant HỒ CHI MINH, en abrogeant les protectorats français en ces termes : « Vu la situation mondiale et celle de l'Asie en particulier, le gouvernement du Vietnam proclame publiquement qu'à dater de ce jour le traité de protectorat avec la France est aboli et que le pays reprend ses droits à l'indépendance ».

 

Il finit par une déclaration d'acceptation du soutien du Japon dans le cadre de la Sphère de Co-prospérité de la Grande Asie Orientale de celui-ci.

 

Le 14 août 1945, les Japonais remirent officiellement le Sud à la cour de HUẾ, et BẢO ĐẠI annonça son annexion, réunifiant ainsi le Viêtnam. Les responsabilités sur les gardes civiles, la sécurité, la police, etc. revinrent à la cour de HUẾ le jour suivant.

 

5. La capitulation japonaise (1945)

 

Le Japon ayant rejeté l'ultimatum des alliés (USA, Royaume Uni et URSS) de la conférence de Potsdam (17 juillet 1945 – 2 août 1945), le 6 août 1945, une bombe atomique fut lancée par les Américains sur la ville de HIROSHIMA (340000 habitants), où se trouvait le centre de commandement de la deuxième Armée du général SHUNROKU HATA qui devait défendre la partie ouest du Japon.

 

Une deuxième visa NAGASAKI (195000 habitants) le 9 août 1945.

 

Ces bombardements, l'invasion par la Russie de la Mandchourie le 8 août et la reddition de l'armée japonaise de GUANDONG le 10 août, firent céder le Japon qui capitula officiellement le 2 septembre 1945, après l'allocution radiophonique de l'empereur HIROHITO donnée le 15 août 1945.

 

Concernant l'Indochine, les alliés décidèrent, sans consulter la France, de confier le rétablissement de l'ordre dans la zone au-dessous du 16ème parallèle aux Britanniques et dans celle au-dessus à la République de Chine.

 

6. La création de la République Démocratique du Viêtnam (2 septembre 1945)

 

La manifestation du 17 août où devant le Grand Théâtre de HANOÏ, environ vingt mille personnes clamaient leur soutien au Viêt Minh jusque-là encore inconnu, fut suivie de celle du 19 août 1945 qui finit par la prise par le Việt Minh de la mairie, du Trésor, de la Poste, etc.… et l’arrestation du représentant du gouvernement de l’Empereur BẢO ĐẠI.

 

L'empereur BẢO ĐẠI décida d'abdiquer. Dans l'acte d'abdication du 25 août, il précisait : « Mieux vaut être citoyen d'un pays indépendant que d'être roi d'un pays esclave ».

 

Le 25 ou le 30 (9) août 1945, eut lieu à HUẾ la remise de l'épée d'or et du sceau impérial en or (10) aux représentants du Viêt Minh. Ainsi disparut l'empire du Viêtnam.

 

HỒ CHI MINH décida de proclamer l'indépendance du pays le 2 septembre 1945 qui était aussi la date de la capitulation officielle du Japon.

 

La VIETNAM DAN CHỦ CỘNG HOA (soit République Démocratique du Viêtnam, ou RDVN) était née, avec pour emblème le drapeau du Viêt Minh, une étoile jaune sur fond rouge. Émues, de nombreuses personnes rejoignirent le mouvement.

 

Cette prise de pouvoir à HANOÏ fut suivie par d'autres dans certaines villes du Nord car le gouvernement ne fit rien pour le conserver.

 

À certains endroits, elle fut faite avec un parti nationaliste, comme à QUẢNG YEN avec le « Viêt Cách ».

 

À HẢI PHONG, le scénario de HANOÏ fut réutilisé, sauf que les autorités de la ville parmi lesquelles il y avait trois Viêt Minh infiltrés, décidèrent elles-mêmes de passer le pouvoir.

 

Dans d'autres, il y eut des combats soit avec les BẢO AN, comme à HA ĐONG (banlieue de HANOÏ) quand le Viêt Minh voulut prendre le camp des BẢO AN dont le chef était membre du VNQDĐ (« Parti nationaliste du Grand Viêt Nam »), soit avec d'autres partis nationalistes, comme à SƠN TAY, PHUC YEN, VỈNH YEN et PHUC THỌ, où ceux-ci étaient bien implantés.

 

7. La France voulait récupérer l’Indochine perdue aux Japonais (1945)

 

On croyait que la France avait été éliminée de la scène des anciens pays d'Indochine. Elle avait laissé les Japonais s’y installer suite à quelques ultimatums, l’utiliser comme base d'opérations vers le sud-est asiatique, et finalement s’en faire chasser dans la nuit du 9 Mars 1945.

 

Et une demande en octobre 1943 de sa part d'avoir une délégation militaire au sein du SEAC (South-East Asia Command - Commandement du Sud-Est Asie) (11) avait été refusée par les Alliés de la guerre du Pacifique (les États-Unis, le Royaume Uni et L’URSS), ainsi que sa proposition d’au début de 1945 de participer à toute action du général Douglas Mac Arthur en Indochine.

 

Le président des États-Unis Franklin D. ROOSEVELT était contre le retour de la France.

 

Pour lui, le principe « chaque peuple avait le droit de choisir la forme de son gouvernement » était valable pour tout le monde, et les colonies devaient être mises sous mandat international pour se préparer à devenir indépendantes. Mais il mourut trop tôt (12 avril 1945) pour pouvoir s’opposer au désir de la France.

 

Pour le Premier Ministre Britannique Winston CHURCHILL, seuls les pays occupés par l'Allemagne nazie étaient concernés par le sujet de l'indépendance, et celle des pays de l'Empire britannique dépendrait du Commonwealth.

 

Concernant l'Indochine, il pensait déjà à l'Europe de l’après-guerre, et préférait le retour de la France qu'elle considérait comme « extrêmement sensible, proche d'être un malade, avec tout ce qu'elle considérait l'avoir abaissée », comme le mentionnait un rapport de son ministère des affaires étrangères. Ne pas la soutenir sur l'Indochine pourrait provoquer sa colère et « générer des conséquences incalculables » dans les deux continents et non seulement un.

 

Pour le général de GAULLE, restaurer la crédibilité de la France comme grande puissance était nécessaire. Et cela passait par un retour à l’Indochine de la France. « HANỘI était perçue comme la dernière étape de la restauration nationale » écrivit Jean-François KLEIN (12) sur la politique de de GAULLE à cette époque.

 

8. La solution d’une Fédération Indochinoise au sein d’une Union Française dominée par la France

 

Le 24 mars 1945, alors qu'il s'apprêtait à prendre le pouvoir en France, il proclama son intention de restaurer l'autorité de la France en Indochine, et la création d'une « Fédération Indochinoise », remplaçant la vieille « Union indochinoise » de 1887, toujours composée de cinq entités, faisant partie intégrante de « l’Union Française » (mot trouvé par Paul MUS) (12) composée de la France et de ses territoires, colonies et États associés.

 

Le 19 août 1945, BẢO ĐẠI lança à de GAULLE « l'appel d'un ami et non d'un chef » en lui demandant de reconnaître l'indépendance du pays. « [...] Le peuple vietnamien ne veut plus, ne peut plus supporter aucune domination ni aucune administration étrangère. [...] Je vous prie de comprendre que le seul moyen de sauvegarder les intérêts français et l’influence spirituelle de la France en Indochine est de reconnaître franchement l’indépendance du Viêt Nam et de renoncer à toute idée de rétablir ici la souveraineté ou une administration française sous quelque forme que ce soit (13). »

 

Il envoya aussi un télégramme au président des États-Unis Harry TRUMAN et au Premier ministre britannique Clément ATTLEE.

 

Le 24 août, ignorant ce message de l’empereur vietnamien ou probablement pour lui répondre, Charles de GAULLE réaffirma dans une conférence de presse à Washington (14), par un appel de « la mère patrie à ses enfants », la volonté de la France de récupérer sa souveraineté sur l’Indochine (15).

 

L’illusion que la France était la mère patrie des Vietnamiens restait vivace chez les Français.

 

L’Association Nationale pour l’Indochine française (ANIF) avait déjà été créée en août 1943 à Alger, avec pour but de servir la cause du retour de l’Indochine à la France. Elle comptait parmi ses membres, René PLEVEN, son créateur, et d’éminentes figures politiques et militaires, dont le général CATROUX, et était présidée au niveau national par Alexandre VARENNE, député radical-socialiste, ancien gouverneur général en Indochine (1925-1928).

 

Préparé au Commissariat des Colonies à Alger, le projet était de créer un nouveau partenariat politique entre les cinq pays qui auraient chacun leur propre gouvernement, et le tout sous le contrôle d'un gouvernement fédéral puissant présidé par un haut-commissaire de France.

 

Le discours de sa revue (16) présentait les Indochinois comme n’ayant pas encore acquis la maturité politique nécessaire à l’indépendance, et que sans la France, garante de l’ordre et force libératrice, l'Indochine serait livrée au « désordre » et à « l’anarchie ».

 

Comme à la création de l'Union Indochinoise en 1887, les promoteurs de ce projet ne tinrent pas compte des désirs des peuples qu'ils voulaient « fédérer », comme s'ils n'avaient pas vu que les trois peuples (et non cinq) ne voulaient pas être dominés par la France.

 

Les Français ne voulaient pas comprendre que les sacrifices de tous les Vietnamiens depuis 1858 visaient une « pleine » indépendance, et non pas la « liberté sous domination française » préconisée par le Général. Par tactique, une position transitoire pouvait être envisagée, mais ce serait seulement un tremplin pour aller plus loin. La longue histoire du Viêtnam ne l’avait-elle pas amplement démontré ?

 

La France ne s’était-elle pas elle-même battue pour se dégager complètement des Allemands ?

 

Le père CAO VAN LUẬN (1908-1986), futur recteur de l’université de HUẾ, qui était à Paris au moment de la libération en 1944, était ému aux larmes de voir la joie du peuple français après quelques années de domination allemande. Il pensait à ce que serait celle des Vietnamiens après une centaine d’années de domination française (17), un sentiment que le Général n’accepta pas de comprendre alors qu’il avait pris part dans la libération de son propre pays.

 

Le monde avait aussi évolué et la France refusait de s’en rendre compte : les États-Unis avaient accordé l’indépendance aux Philippines en 1946 ; l’Inde était devenue indépendante en 1947, une vraie indépendance qui donna de l’espoir aux pays de la région encore soumis au joug colonial ; la Birmanie devint officiellement indépendante des Anglais le 4 janvier 1948 ; et les Indonésiens des Hollandais le 1er décembre 1949. L'ex-empereur BẢO ĐẠI qui avait fait tout ce qu'il avait pu, déplora : « Vraiment les Français n’ont pas compris ce qui s’est passé en Extrême Orient ».

 

Avec les partis nationalistes, il avait accepté la solution de l’État du Viêtnam au sein de l’Union Française comme solution intermédiaire (18). Mais il ne put obtenir de la France des traités sur l’indépendance complète du Vietnam que le 4 juin 1954, c’est-à-dire presque un mois après sa défaite devant les forces Viêt Minh à la bataille de ĐIỆN BIEN PHỦ (7 mai 1954).

 

L’État du Viêtnam était considéré par la population vietnamienne comme une créature de la France où rien ne pouvait se faire sans son accord – un auteur le qualifia « d’indépendant mais ... » – pour elle, il n’était pas crédible. Et son existence renforçait le prestige de la RDVN de HỒ CHI MINH qui menait elle-même ses affaires diplomatiques, avait sa propre armée, et se battait pour « l’indépendance complète », c’est-à-dire pour le retrait total des Français du pays.

 

Beaucoup de Vietnamiens, par amour de la patrie, sans adopter le communisme, préféraient se joindre au Viêt Minh pour chasser pour toujours l’envahisseur Français.

 

Lord MOUNTBATTEN, le chef du SEAC (South-East Asia Command – Commandement du Sud-Est Asie), réaliste, avait dit au général LECLERC : « Reconquérir l'Indochine, ce n'est pas sérieux. Le monde a changé. Vous n'y arriverez pas ».

 

9. La fin de la guerre d’Indochine (1954)

 

Lord MOUNTBATTEN avait raison. Les Français n’arrivèrent pas à reconquérir l’Indochine. Ils furent battus dans plusieurs batailles par un Viêt Minh soucieux de libérer son pays de ceux qui voulaient le dominer, et soutenu sans faille par la Chine et l’URSS qui l’équipaient, le formaient et le conseillaient.

 

La dernière bataille, celle de ĐIỆN BIỆN PHỦ où 11721 défenseurs du côté français se rendirent au Viêt Minh, sonna le glas des désirs de la France.

 

HỒ CHI MINH avait toujours voulu résoudre le conflit par des négociations.

 

Et il était très clair sur de telles négociations : « Si le gouvernement français, tirant des leçons de la guerre de ces dernières années, veut aller vers une trêve par la négociation et résoudre les problèmes du Viêtnam par la voie pacifique, le peuple vietnamien et le gouvernement de la RDVN sont prêts à l’accepter [...] Il suffit que le gouvernement [français] arrête sa guerre d’invasion pour qu’il y ait un cessez-le-feu. La base du cessez-le-feu au Viêtnam est le respect de la véritable indépendance du Viêtnam [...] (19). »

 

C’était le sens de sa déclaration du 29 novembre 1953 au journal suédois EXPRESSEN.

 

Parlant des conditions indispensables pour arriver aux négociations, il avait précisé : « L’expérience de la Corée nous montre qu’il faut se battre jusqu’à ce que l’impérialiste soit à terre. Sachant qu’il ne peut plus combattre, il acceptera de négocier [...] Nous devons aussi nous battre pour que la France soit à terre.

 

À ce moment, on négocie s’il y a des négociations, ce n’est pas en lui proposant de négocier qu’elle va tout de suite négocier. N’ayons pas des illusions. Son but est de nous envahir. S’il lui reste 1 % d’espoir après avoir perdu 99 %, elle continuera de se battre. Il faut la mettre à terre pour qu’elle accepte de négocier. » (20)

 

La Conférence de Genève en 1954 qui réunissait tous les belligérants et leurs soutiens internationaux officialisa la séparation du Viêtnam en deux parties, une gérée par les communistes et l’autre par ceux qui ne voulaient pas de ce régime, et le départ définitif de la France.

 

CONCLUSION AMERE !

 

Les Français avaient dû finalement rentrer chez eux après neuf ans de retour au Viêt Nam pour rien.

 

Leur équipée aurait fait 400000 à 450000 victimes (tués ou disparus) dont 12997 officiers et soldats français et 17810 légionnaires et tirailleurs africains et nord-africains (21).

 

3000 milliards d'anciens francs avaient été dépensés, dont 614 milliards par les USA dans le cadre de leur aide à la France les dernières années (22).

 

Et là, on n’a pas compté toutes les larmes des mères, épouses, enfants et proches de ceux qui étaient tombés durant cette guerre.

 

 


 

 

NOTES et BIBLIOGRAPHIE

 

Le Temps des Ancêtres : une famille vietnamienne dans sa traversée du XXe siècle, NGUYỄN NGỌC CHAU, éd. L'Harmattan, 2018). préfacé par l’historien Pierre Brocheux et publié par les Editions Nombre 7, Seconde édition, 2020). Informations sur :
https://drive.google.com/file/d/1wAjGtHC4jEfRBtUywxkPcbuf9oMy6ba6/view?usp=sharing 

 

(1) Au pont LIGOU, appelé encore pont MARCO POLO, prétextant chercher un de leurs soldats disparu, et disant qu'ils avaient essuyé des tirs, les japonais voulurent fouiller toutes les maisons. Devant le refus des chinois, ils firent venir des renforts et s'emparèrent de PEKIN. Le soldat avait, en fait, passé deux heures dans une maison de passe !

 

(2) L'Indochine française 1854-1954, Pierre MONTAGNON, Texto, éd. Tallandier, 2016.

 

(3)  Le coup de force Japonais de 1945 en Indochine (Cliquer sur le lien)

  

(4) Vietnam 1945 : The Quest for Power (Vietnam 1945 : La quête du pouvoir militaires), David G. MARR.

 

(5) En quarante-huit heures, plus de deux mille militaires français incluant des membres de la force de résistance du général Mordant 6, auxquels s’ajoutaient de nombreux non Français, perdirent la vie, soit tués au combat, soit assassinés. Le général Émile Lemonnier et le colonel ROBERT, qui s’étaient défendus jusqu’au bout de leurs munitions à LẠNG SƠN, et le résident général APHELLE, furent décapités sur place. Le général Mordant lui-même dut capituler et fut emprisonné jusqu'à la défaite des Japonais. 15000 hommes des forces armées françaises furent mis en prison dont 12000 Européens. D’autres se réfugièrent en Chine.

 

(5) La piastre et le fusil, le coût de la guerre d'Indochine 1945-1954, Hugues TERTRAIS, Comité pour l'histoire économique et financière de la France.

 

(6) Le général MORDANT a laissé un livre Au service de la France en Indochine, 1941-1945 (Saïgon, imprimerie française d'Outremer, 1950).

 

(7) Le seul État pleinement souverain allié à l'Empire du Japon était le Royaume de Thaïlande.

 

(8) Viêtnam: a state born in the war 1945-1954 (Viêtnam : un État né dans la guerre 1945-1954), de Christopher GOSCHA.

 

(9) Suivant les sources, c'était le 25 ou le 30 août.

 

(10) Durant la nuit du 19/12/1946, après des combats avec les Français à HA NỘI, le sceau d'or et l'épée d'or brisée en deux furent mis dans un container métallique vidé de ses litres de pétrole et enterrés par le Viêt Minh en fuite. Redécouverts en 1952 par l'armée française, ils furent restitués à BẢO ĐẠI par l’intermédiaire de sa deuxième femme, MỘNG ĐIỆP, lors d'une cérémonie à ĐA LẠT en présence de la mère de l'ex-empereur. Madame MỘNG ĐIỆP fit réparer l'épée et l'amena avec le sceau en France en 1953 pour les remettre à ce dernier en mains propres (réf : Le Temps des, Ancêtres : une famille vietnamienne dans sa traversée du XXe siècle, NGUYỄN NGỌC CHAU, éd. L'Harmattan, 2018).

 

(11) La SEAC (South-East Asia Command – Commandement du Sud-Est Asie) était appelée de façon ironique par les Américains « Save England's Asiatic Colonies » (Sauver les colonies asiatiques de l'Angleterre).

 

(12) Article de Jean-François KLEIN sur De Gaulle, les Gaullistes et l’Indochine de Frédéric Turpin, éd. Indes savantes, Paris, dans Moussons, 13-14 |209,406-410.

 

(13) The Struggle for Indochina 1940 – 1955, Vietnam and the French Experience by Ellen J. Hammer, Stanford University Press, 1966.

 

(14) End of Empire: One hundred Days in 1945 that changed Asia and the World (Fin de l’Empire: 100 jours en 1945 qui changèrent l’Asie et le Monde) – 2016, David P. CHANDLER (Editor), Robert Cribb (Editor), LI NAGANGOA (Editor).

 

(15) L'Indochine française 1858-1954, Pierre Montagnon, collection Texto, Tallandier.

 

(16) La revue Indochine française, organe de propagande de l’Association nationale pour l’Indochine française [ANIF] parut de septembre 1944 à 1947, et fut relayée par la revue mensuelle France-Indochine qui disparaîtra en 1955.

 

(17) BEN GIONG LỊCH SỬ, HỒI KÝ 1940-1965 (À côté du cours de l'histoire, mémoires 1940-1965), père CAO VAN LUẬN. Ed TRI DUNG

 

(18) Ratification le 26 janvier 1950 par l’Assemblée nationale française des accords de l’Élysée du 8 mars 1949 reconnaissant le Viêt Nam comme État associé, membre de l’Union Française.

 

(19) Hồ Chí Minh (2009), Toàn tập (Hồ Chí Minh (2009), l’Intégrale), éd. Chính trị quốc gia, Hà Nội, t.7, pages 10. Cité par TRẦN HOANG dans son HỒ CHI MINH với việc triệu tập Hội nghị Genève năm 1954 về Đông Dương (HỒ CHI MINH et la convocation à la Conférence de Genève en 1954 sur l’Indochine).

 

(20) HỒ CHI MINH (2009), TOAN TẬP, éd. CHINH TRỊ QUỐC GIA, HA NỘI, t.7, pages 112-113.

 

(21) Histoire de la guerre d'Indochine, général Yves GRAS (DENOËL, coll. “L'aventure coloniale de la France”, 1992)

 

(22) La piastre et le fusil, le coût de la guerre d'Indochine 1945-1954, Hugues TERTRAIS, Comité pour l'histoire économique et financière de la France.

 

Extraits de « Viêtnam – L’histoire politique des deux guerres – Guerre d’indépendance (1858-1954) et guerre idéologique ou Nord-Sud (1945-1975) » de Chau NGUYEN NGOC, préfacé par l’historien Pierre BROCHEUX et publié par les Editions NOMBRE 7, 2de édition, 2020).

 


 

 

 



13/05/2023
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